Les temps forts du répertoire musical de Jacques Hélian

DES CHANSONS, DU RYTHME, DU JAZZ,  DE LA BONNE HUMEUR

Nous sommes en 1945 ; la France sort des années noires. Elle retrouve, enfin, l’espoir et l’optimisme. Les Français ont envie de chanter, mais ils ont aussi envie de se changer les idées, car les difficultés matérielles dans la France de l’après-guerre restent considérables.

Jacques Hélian propose à une France encore très rurale des chansons simples mais contagieuses, fraiches, sans prise de tête mais bien interprétées, bien arrangées. C'est ce que Brassens appelait "La chanson du maçon": il en était lui-même friand; on pouvait se l'approprier très vite et elle était redoutablement contagieuse.

Sur scène, Jacques Hélian va nous "montrer" ses musiques ; son style de spectacle va être immédiatement plébiscité par le public: Une prestation de plus de 2 h 30 avec des chansons, du jazz, de la bonne humeur, du rythme, de la fantaisie, du visuel, bref un spectacle complet. A partir de 1949/50, quand les comptes de l’entreprise deviennent prometteurs, Hélian commence à se permettre « des tas d’audaces » comme l’écrit Daniel Nevers, qui poursuit ainsi : « Il se paie des arrangeurs réputés capables de lui écrire des orchestrations fort complexes ; il impose des programmes astucieux, à la fois divertissants et didactiques, où le jazz a toujours la place de choix ».

Chez Jacques Hélian, tout se faisait très vite. Avant un enregistrement, Les cuivres répétaient dans un coin, les percussions dans un autre, les chanteurs dans un autre, et puis on réunissait tout le monde et, 9 fois sur 10, la première prise était la bonne ! Les premières années, s’il fallait une deuxième prise, on entendait souvent l’ingénieur du son hurler qu’il n’avait plus de cire ...

2 Juillet 1947: "Open the door Richard" marche très fort aux Etats-Unis. Jacques Hélian décide d'enregistrer une version en Français. Il donne les paroles à Zappy Max quelques minutes avant l'enregistrement et lui dit: "Ne t'inquiète pas pour la musique, pour toi il n'y en a pas...contente toi de dire les paroles et de les caser dans l'orchestration".
Ainsi naquit, dès la première prise, "Ouvre la porte Richard", l'une des plus célèbres prestations de Zappy Max, qu'Henry Salvador aussi interpréta de son côté: Jacques Hélian essayait toujours de stimuler l'improvisation pour que la musique qui sortait des studios d’enregistrement soit authentique, spontanée, vivante ; la notion même de trucage était inimaginable.

C’était aussi un répertoire extrêmement éclectique dans lequel le jazz et la java étaient cote à cote de la façon la plus naturelle: jamais, jusque là, un grand orchestre de music-hall n’avait exploré autant de domaines musicaux aussi divers.

Jacques Hélian s’est entouré d’arrangeurs de talent au premier rang desquels René Beaux, qui a su admirablement « marier les notes qui s’aiment » et créer, avec la collaboration de Gérard Lévecque pour le jazz, ainsi que de Janot Morales et Michel Legrand, un "son Jacques Hélian" d'une étonnante modernité. 

Roland Fauré